Mariangela Gualtieri est née en 1951 à Cesena. Dramaturge, elle a fondé la compagnie Teatro Valdoca au début des années 1980 avec Cesare Ronconi. C’est dans ce cadre qu’elle diffuse aujourd’hui ses textes, au cours de performances théâtrales où la musique s’entremêle parfois à la voix, une voix dont la tessiture si particulière explore les graves et les silences. Avec une assurance calme, elle pousse la syntaxe italienne jusque dans ses retranchements, cherchant à se dépouiller de sa rationalité, à se « désarmer » comme elle dit, pour laisser place à ce « non savoir » sous-jacent qui la fascine, plus intéressant que sa part rationnelle. Le résultat est une poésie mystérieuse, heurtée, parfois douée d’un mysticisme étrange.
Les traductions sont parues dans la revue L’Intranquille n°7, Atelier de l’Agneau, septembre 2014, p.11-21.
Senza polvere senza peso (2006)
Qualcosa chiedeva esistenza
nella mia ingombra anima
con la chincaglieria
del pensiero che sforbiciava
la pace della casa.
Adesso non abbaiate più, voci
tempestate del mio cranio
ossi dell’interiore discordia.
*
Guardo questo cuore incartocciato.
Abbi pietà di tutto il mio secco.
Vieni pioggia. Hai in pugno
tutte le vite, tu.
*
« Giuro per i miei denti di latte » giuro per il
correre e per il sudare giuro per l’acqua e
per la sete giuro per tutti i baci d’amore
giuro per quando si parla piano la notte
giuro per quando si ride forte giuro per la parola no
e giuro per la parola mai e per l’ebrezza
giuro, per la contentezza lo giuro.
Giuro che io salverò la delicatezza mia
La delicatezza del poco e del niente
del poco poco, salverò il poco e il niente
il colore sfumato, l’ombra piccola
l’impercettibile che viene alla luce
il seme dentro il seme, il niente dentro
quel seme. Perché da quel niente
nasce ogni frutto. Da quel niente
tutto viene.
Traduction (extraits)
Quelque chose demandait l’existence
dans mon âme encombrée
par la quincaillerie
de la pensée qui découpait
la paix du foyer.
Maintenant vous n’aboyez plus, voix
tempétueuses dans mon crâne
os de la discorde intérieure.
*
Je regarde ce cœur recroquevillé
Aie pitié de toute ma sécheresse
Viens, pluie. Tu as dans ton poing
toutes les vies, toi.
*
« Je jure par mes dents de lait » je jure par la
course et par la sueur je jure par l’eau et
par la soif je jure par tous les baisers d’amour
je jure par quand on parle bas la nuit
je jure par quand on rit fort je jure par le mot non
et je jure par le mot jamais et par l’ivresse
je jure, par le contentement je le jure.
Je jure que je sauverai ma délicatesse
la délicatesse du peu et du rien
du peu peu, je sauverai le peu et le rien
la couleur estompée, l’ombre légère
l’imperceptible qui vient à la lumière
la graine dans la graine, le rien dans
cette graine. Parce que c’est de ce rien
que naît chaque fruit. De ce rien que
tout provient.